Parcours d’expérimentation d’EDSC avec les subventions et contributions

L’expérimentation à l’œuvre
10 min readDec 18, 2020
Crédit: Ake (rawpixel.com)

Depuis l’introduction des Directives relatives à l’expérimentation en 2016, le domaine de l’expérimentation s’est développé de façon constante dans l’ensemble du gouvernement fédéral. Bien que ce ne soit pas nouveau pour Emploi et Développement social Canada (EDSC), les derniers mois ont connu une évolution majeure vers l’expérimentation à la Direction générale des opérations de programmes (DGPO) avec la création de l’Équipe de recherche et d’innovation (R-I) et le lancement de deux projets d’expérimentation. Une expérience menée par l’Équipe de R-I sur les demandes incomplètes et une autre menée par la Stratégie emploi et compétences jeunesse (SECJ) sur les jeunes confrontés à des obstacles dans l’accès aux programmes d’emploi.

En septembre 2020, je me suis jointe à la DGPO en tant qu’étudiante avec l’Équipe de R-I. Étant nouvelle au secteur public, j’étais intriguée par la façon dont l’expérimentation est appliquée à l’exécution des programmes et j’ai appris qu’il s’agit d’un nouveau domaine sous-exploré pour les subventions et contributions (S et C). Le travail réalisé au sein de l’équipe et de la Direction générale contribue à bâtir les premières étapes vers une culture de prise de décision fondée sur des données probantes par le biais d’une lentille humaine. Pour m’aider à comprendre et à expliquer ce travail, j’ai réalisé cinq entrevues au cours des dernières semaines avec des fonctionnaires au sujet du travail de R-I sur les demandes incomplètes. J’ai décidé de me concentrer sur ce projet puisque mon stage d’étudiant fait partie de l’équipe de R-I. Vous lirez les processus réfléchis des personnes directement impliquées dans ce projet, ainsi que d’autres qui jouent des rôles clés de leadership.

Qu’est-ce que l’expérimentation? Pas seulement des scientifiques dans un laboratoire!

L’expérimentation est capable d’utiliser de vieilles manières de voir quelque chose et de faire place au changement et à l’innovation. En parlant des détails de l’expérimentation à l’égard de ce processus, Éric Beauchamp, responsable du projet et conseiller principal en affaires au sein de l’équipe de R-I, constate que « c’est surtout une question de culture. C’est à propos de la culture et de la prise de décision solide et éclairée. Ce projet est très important, parce qu’il s’inscrit dans une tendance plus vaste actuellement au gouvernement à prendre des décisions fondées sur des données probantes, à utiliser des outils comme la recherche, les données et l’analyse des données, comme l’expérimentation, ce qui signifie tester et valider les innovations et les améliorations avant de les mettre à l’échelle et de les mettre en œuvre à grande échelle ». L’expérimentation prend la manière traditionnelle de faire les choses, que ce soit au gouvernement ou ailleurs, et la remet en question. Elle remet en question la pensée que nous avons toutes les réponses; elle nous permet d’explorer différentes avenues de changement. Ce changement est le changement de culture qui est nécessaire, en particulier dans les grandes organisations comme le gouvernement, pour les amener à se moderniser.

Définition de l’expérimentation du Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT)

« Activités visant d’abord à examiner, puis vérifier et comparer les effets et l’impact des politiques et des interventions visant à éclairer la prise de décisions fondée sur les données probantes et à améliorer les résultats pour les Canadiens, en apprenant ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. L’expérimentation est liée à l’innovation (l’essai de nouvelles approches), mais est différente en ce qu’elle comporte une comparaison rigoureuse des résultats. Par exemple, l’utilisation d’un nouveau site Web pour communiquer avec les Canadiens pourrait être une innovation, tout en le mettant systématiquement à l’essai par rapport aux outils de communication existants (ou même à un ancien site Web) pour voir lequel mène à une plus grande mobilisation est une expérience. »

L’expérimentation nous permet également de tester rigoureusement l’incidence de nos options possibles avant de les mettre en œuvre à grande échelle. À ce sujet, Farhia Ahmed, gestionnaire de l’équipe de R-I, déclare : « Il y a une chose que je voudrais souligner à nos collègues de la Direction générale qui ne connaissent peut-être pas l’expérimentation : tout comme dans un laboratoire, quand vous essayez de faire quelque chose différemment, vous voyez et vous étudiez d’abord d’où vient le problème et à quoi ressemblaient les versions précédentes des solutions. Quelles ont été les réactions? Quel était le contexte? Cela vous permet d’avancer vraiment concrètement avec votre théorie, puis d’étudier davantage. Toute la notion d’expérimentation prend de nombreux concepts scientifiques et l’applique à un processus que beaucoup ne considèrent pas comme un processus scientifique. Et c’en est vraiment un. »

L’expérimentation remet en question les modes de pensée traditionnels. Elle permet d’essayer de nouvelles choses et d’apprendre de nos erreurs. En parlant de ce concept d’erreur, Ahmed mentionne également que, « par l’expérimentation, nous passons par les mouvements du problème, à l’idée, à la solution. Nous veillons à ce que chaque étape du chemin soit recensée et inventive. L’idée est que, si nous nous laissons la place pour nous remettre en question, et la façon dont nous faisons les choses, nous avons alors plus de place pour grandir et élargir notre réflexion. Nous pourrions échouer, et nous pourrions échouer à nouveau, mais à chaque fois, nous apprendrons de ce qui s’est mal passé et pourquoi. L’échec n’est qu’une occasion de voir ce que vous pouvez bien faire la prochaine fois. »

Erica Vezeau, promotrice du projet et directrice de la planification intégrée et de l’analyse des activités, a discuté du concept de modernisation, « il nous amène simplement dans un espace plus moderne en tant que service public, et il nous rapproche de nos objectifs d’explorer, de faire mieux, d’être axés sur le client et d’être axés sur les données. » À mesure que notre société évolue, l’expérimentation permet à la fonction publique d’explorer et de mettre en œuvre ce qui fonctionne non seulement pour que les fonctionnaires travaillent plus efficacement, mais aussi afin d’obtenir de meilleurs services pour les Canadiens.

Un projet est né — Une expérience sur les demandes incomplètes

Créée au début de 2020, l’équipe de recherche et d’innovation (R-I) a pour mandat de réaliser des recherches portant sur une variété de sujets allant de l’expérience des clients aux obstacles pour les populations en situation de vulnérabilité, en passant par les processus et les résultats des programmes. L’un des projets phares de l’équipe est la conception et la réalisation d’une expérience en collaboration avec le SCT dans le cadre de l’Expérimentation à l’œuvre 2 (EO2). Cette initiative vise à renforcer la capacité de la fonction publique à expérimenter et elle affiche divers projets où des ministères sélectionnés font des expériences en collaboration avec des experts en conception expérimentale pendant la durée de leur projet.

Dans le cadre de ce projet, l’équipe de R-I cherche à savoir pourquoi certains programmes de subventions et de contributions au sein de notre Direction générale reçoivent un grand nombre de demandes incomplètes (par exemple, si elles ne contiennent pas de documents obligatoires ou de renseignements clés), ce qui entraîne des retards dans la prise de décision des candidats et une augmentation de la charge de travail des programmes. Cela finit par réduire la qualité et la rapidité des services offerts aux Canadiens.

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Le projet recherche et mesure des éléments de l’expérience de soumettre une demande et de quelle façon ceux-ci influencent les taux d’achèvement des demandes de S et C. Au fur et à mesure que le projet avance, l’équipe a fait preuve de créativité grâce aux nouveaux outils collaboratifs en ligne qu’elle utilise (par exemple Miro, un service de tableau blanc en ligne), ainsi qu’à de nouveaux outils de recherche (par exemple Zotero) ou par la création d’une bibliothèque commune de ressources à utiliser à des fins de formation.

Grâce à ce projet, l’équipe de R-I augmentera également la capacité expérimentale de la Direction générale et élargira sa compréhension d’un élément clé de nos interactions avec les Canadiens, à savoir leurs demandes de subventions et de contributions. Enfin, elle nous permettra de mieux comprendre les comportements de nos clients et d’être plus centrés sur l’utilisateur dans les stratégies et les décisions futures.

Renforcer nos capacités

L’expérience des demandes incomplètes est considérée comme un essai. Dans ce contexte, elle est particulièrement avantageuse pour les fonctionnaires qui interagissent avec celle-ci. Elle nous permet d’apprendre et de grandir et, comme le dit Vezeau, « de jeter les bases » des prochains projets. Elle fournit un exemple clair non seulement pour notre équipe à l’avenir, mais également pour tous ceux qui entendent parler de notre participation à cette nouvelle perspective d’expérimentation.

L’expérimentation fait également partie d’un gouvernement plus inclusif et diversifié qui s’efforce, comme le dit Reem El-Attar, qui travaille à l’examen de la documentation pour l’équipe de R-I, « de renforcer notre capacité et de favoriser une culture d’apprentissage et d’innovation ». La nature unique de l’expérimentation invitera de nouvelles idées. Elle favorise plus d’une façon de penser, ce qui, à son tour, signifie plus d’une façon de faire. Elle donne aux organismes et aux clients une marge de manœuvre pour obtenir des services comme ils en ont besoin et comme ils le veulent. Elle élimine l’esprit unique et la manière unique de faire les choses, et fait place à une multitude de solutions.

Pierre-Olivier Bédard, l’expert désigné du projet dans de l’équipe d’expérimentation du SCT, renforce cela, comme il le mentionne, l’expérimentation nécessite souvent des compétences et des opinions diversifiées. Il dit : « J’ai l’impression que ce projet a une équipe vraiment bien formée et un très bon mélange de personnes qui travaillent pour le faire avancer, et je pense que c’est vraiment essentiel. En voyant que nous avons des experts en la matière, on a des experts en conception expérimentale; on a toute une gamme de personnes qui contribuent toutes au projet. Avoir une équipe multidisciplinaire est aussi essentiel. » Il ne fait aucun doute qu’un projet expérimental prend non seulement de la diversité dans la méthode, mais aussi un ensemble diversifié de compétences pour l’exécuter. Avec des employés de tous les horizons professionnels et scolaires, nous entendons des opinions et des recommandations différentes que nous n’aurions peut-être pas entendues autrement.

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Conception par des humains pour les humains

Beauchamp participe à la conception de programmes depuis plusieurs années. « Je suis un grand amateur de la conception axée sur les humains, de la réflexion conceptuelle, de ces nouvelles tendances qui se manifestent là où les entreprises regardent au-delà des processus et des produits livrables pour comprendre les émotions humaines, et les facteurs du comportement humain en jeu », indique-t-il. Dans l’équipe de R-I, il est particulièrement important pour nous d’examiner plusieurs perspectives. Nous utilisons l’expérimentation pour comprendre tous les aspects de l’échange de services que nous fournissons, afin d’améliorer notre exécution lorsque nous fournissons ces services.

Parlant de la satisfaction de la clientèle comme objectif final, El-Attar explique que « l’examen de la documentation [pour l’expérience des demandes incomplètes] pourrait révéler des solutions qui pourraient aider les organismes que nous desservons. En particulier, ceux qui desservent les groupes vulnérables et ont une capacité limitée. » Nous apprenons que chaque organisme est différent et que tout le monde n’aura pas besoin du même type d’aide. L’expérimentation nous permet d’essayer de nouvelles choses et de nous concentrer sur l’humain dans nos processus de conception de services. Dans notre cas, c’est particulièrement important pour les populations vulnérables comme les personnes âgées qui ne le veulent pas de financement ou qui ne peuvent pas y accéder par des moyens de communication numériques seulement.

Vezeau souligne que « l’élément le plus important de ce projet… est [qu’il s’agit] de jeter les bases d’une réflexion différente dans la Direction générale sur la façon dont nous faisons notre travail, la façon dont nous exécutons ces programmes et la façon dont nous concevons ces programmes. Si nous réussissons à ce niveau, nous verrons d’autres projets comme celui-ci. Et même si ce projet n’a pas d’incidence directe ou mesurable sur les clients, sur les Canadiens, l’un de nos prochains le fera peut-être. Toutefois, nous n’en arriverons jamais aux prochains tant que nous n’en aurons pas fini avec celui-ci. » Notre conception de services axés sur l’humain donne l’exemple que l’on peut faire les choses différemment, que les processus peuvent être conçus pour les humains par les humains.

Prochaines étapes

Compte tenu de la situation pandémique actuelle, nos services publics doivent communiquer avec les Canadiens et les et écouter afin de mieux les servir. C’est ce qui rend nos contributions si précieuses. En écoutant les participants directs, l’expérience des demandes incomplètes a plusieurs facettes et diverses voix qui y contribuent. Ces voix diversifiées sont ce qui motive le projet et favorise l’innovation.

Chaque personne interrogée dans le cadre de ce projet a une perspective unique sur ce qu’elle considère comme le plus bénéfique. Il y a plusieurs leçons à tirer de l’expérimentation, et ces leçons sont importantes sur la voie d’un gouvernement plus moderne. Comme nous l’avons mentionné tout au long de cet article, EO2 permet la collaboration, l’exploration et la possibilité d’échouer vers l’avant. Quelle est la vision future pour notre Direction générale dans ce domaine? La Direction générale est enthousiaste à l’idée d’expérimenter et, dans les années à venir, elle a l’intention d’élargir les travaux afin d’inclure d’autres approches novatrices dans la conception des programmes et d’examiner à quoi pourrait ressembler l’avenir des programmes de subventions et de contributions. Nous testons de nouvelles façons de travailler et de laisser de la place à l’apprentissage — et c’est ce dont il s’agit en matière d’expérimentation.

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Billet de blogue redigé par l’équipe de recherche et d’innovation du projet EO2 (Emma Peters, Eric Beauchamp, Farhia Ahmed), Direction générale des opérations de programmes, EDSC.

Article also available in English here: ESDC’s Experimentation Journey with Grants and Contributions

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L’expérimentation à l’œuvre

Présentation de l’expérimentation au sein du gouvernement du Canada: https://linktr.ee/GCEXP | Suivez notre parcours en anglais: https://exp-works.medium.com/